La voix des Mauriciens d’ailleurs
Le monde évolue, et notre pays avec. Cette génération de Mauriciens avait décidé qu’elle allait transcender les frontières culturelles, idéologiques, politiques et géographiques. Dans un contexte de mondialisation où les nations se font concurrence pour attirer les meilleurs talents, Maurice se doit de tout faire pour devenir une plateforme non seulement de la finance, mais aussi du commerce et surtout du savoir. Le savoir, qui va au-delà de l’information, et la créativité seront les derniers remparts qui nous distingueront de l’intelligence artificielle dont le niveau de savoir mathématique et technique éloigneront du marché du travail ceux dont les fonctions reposent sur l’application de connaissances purement techniques, ou hyper spécialisés. Dans ce contexte, la diaspora représente pour Maurice un bassin de talents qu’elle a les moyens et je dirai même le devoir d’exploiter, car parmi ses membres se trouvent justement des citoyens qui ont osé pousser les frontières pour fonder des communautés de Mauriciens sur tous les continents du monde.
Les membres de la Diaspora sont souvent plus au fait de l’actualité que nos compatriotes sur l’Île. Les gens évoluent dans leur bulle sociale et sont souvent tout à fait déconnectés des problématiques sociales qui pourtant influencent leur quotidien. Pourquoi un citoyen non informé, ou qui se refuse de participer à la vie démocratique aurait plus le droit de s’impliquer dans les affaires de la cité qu’un autre qui fait son devoir démocratique? Que nous soyons à Maurice ou à l’autre bout du globe, nous partageons les mêmes sources d’informations, réagissons sur les mêmes réseaux et sommes tous, peu importe où nous habitions, face au même constat quant au piteux état de notre démocratie. L’identité Mauricienne aujourd’hui ne peut plus être contenue par la seule géographie. Elle évolue avec son temps et nous vivons à une époque où être Mauricien, c’est surtout un état d’esprit, un attachement à des gens et à une terre, et pas nécessairement le fait d’habiter un lieu particulier.
Nous pensons que le déni du caractère transnational des identités contemporaines et notre refus de puiser cette énergie diasporique nous rend vulnérable à la mondialisation, celle qui fait fuir les filles et les fils du sol loin de la mère patrie. Nous ne sommes pas la première génération à militer pour une participation plus inclusive de tous les enfants de la patrie, peu importe où qu’ils aient pu poser leurs valises. L’effort d’organisation que nous proposons aura pour effet de dissiper les doutes quant à la capacité d’un petit groupe de citoyens de bonne volonté, avec peu de moyens de départ et éparpillés à travers le globe, à réaliser des projets inclusifs qui rassemblent, sans discrimination aucune, tous les Mauriciens. Ensuite, et de manière plus fondamentale, nous croyons que l’échange et le dialogue sont les meilleurs moyens d’acquisition de savoirs. Il nous faut réaliser que nous vivons dans un monde où l’on trouve audience pour dire quasiment tout et son contraire, sur les mêmes faits d’actualités. Ce partage de savoirs entre Mauriciens contribuera à une démocratisation et un enrichissement du savoir, qui est notre seul espoir face au déluge d’information et de données inutiles qui insultent nos esprits de démocrates se voulant informés. Les estimations varient, mais la Diaspora comprendrait entre 200 000 et 500 000 individus et nous parlons là de 20% à 50% de la population de Maurice résidant sur des territoires mauriciens.
Tout État est fondé sur le droit. Dans ce cadre, la revendication des Mauriciens d’ailleurs de pouvoir participer à la vie démocratique ne relève aucunement de quelque privilège ou caprice, mais bien d’un droit constitutionnel. Nous sommes là en face d’une situation où la constitution suppose la participation de tous les Mauriciens, mais ne fournit pas les outils juridiques pour que cela puisse se faire en ce 21e siècle. Effectuer un recensement et octroyer un statut à la diaspora représente selon nous le moyen de remédier à ce que nous pouvons qualifier de lacune constitutionnelle. En effet, la Diaspora mauricienne a contribué en 2021 à hauteur de Rs 7 870 000, et ce dans un contexte de COVID 19 qui n’a pas épargné les finances de nos compatriotes installés dans des régions touchées comme en Europe et en Amérique du Nord. Imaginons un instant ce que pourrait être la contribution des Mauriciens d’ailleurs si nous pouvions établir des systèmes de solidarité et d’investissements.